La vie d'interne

Un interne aguerri en vaut plus !
J'ai été interné un mois d'octobre 1957…
Sur les conseils éclairés d'un instituteur, au demeurant efficace (Monsieur RUET… certains s'en souviennent), je passai les concours des ENP Vierzon et Creil ! Après une analyse cartographique des lieux, mon père trouva que les correspondances SNCF seraient mieux adaptées en direction de Creil !
J'entrai donc dans cette caserne, un jour maussade (normal pour eux) et y commençait une croisade…
Effectivement, les moyens de communications permettaient de garder une sérénité inébranlable, départ de Creil à 18 heures le samedi, arrivée gare du Nord, métro, gare de Lyon, arrivée Moret, changement, micheline jusqu'à Nemours… arrivée 22 heures 30
!
Départ de Nemours le dimanche, c'est à dire le lendemain à…16 heures 30 !!!
Ah
! oui…ENP de Creil…Uniforme obligatoire, comme vous pouvez le voir ! Bel internat…Trois étages de dortoir, les "grouillaux" c'était nous, étions au 3ème… 300 dans le même dortoir, sans cloison particulière, je sais, ça calme… (A cette époque nous étions environ 1000 internes). Bizutage, hiérarchie respectée… que de bons moments !!!
En rang, taisez-vous
!
Un coup de trousseau de clés sur la tête … Mais M'ssieu Grosloup, c'est pas moi…
Là, je me dis, le pauvre va se faire tuer… il l'a appelé “Grosloup”.
Ben, non ! en fait c'était son nom, ça ne s'invente pas des choses pareilles et il était surgé, cela va sans dire
!
Ce n'est pas fini, un autre apparaît, je ne sais pas qui il est, un petit sourire forcé au coin des lèvres et “bing”…une tape sur la tête, il ne l'avait pas vu arriver.
Mon voisin, un ancien déjà, il devait avoir 14 ans et demi me dit :
“Fais gaffe à lui, il est vache et y fait mal, on l'appelle Jojo, son nom c'est Georges Guillemin… y paraît même qu'il était dans les paras”.
Pourquoi tu m'as mis là, papa, je n'ai rien fait de mal
!
J'y passerai quatre ans et heureusement Jojo était parti l'année d'avant…
Pour des raisons de résultats très aléatoires, on m'invita à aller voir ailleurs, ce que je fis.
Plus près de toi, mon dieu… (Je ne savais pas si bien dire).
Inscription à Corbeil, beaucoup plus près de chez moi, je suis en seconde… le pied
!
Il n'y a pas d'uniforme, les gars sont propres, je dis ça parce qu'à Creil on pouvait être collé durant tout un trimestre, oh ! quelques petites étourderies, ce qui fait qu'hormis les sous-vêtements qu'on nous obligeait à changer, le reste… bof
!
Une blouse grise, un jean sur le dos et sur le reste pendant trois mois… évidemment ça “s'empire”…
On continue donc, visite de l'internat… je n'en crois pas mes yeux, des cloisons individuelles, on est quarante ou cinquante maxi, peut-être moins… le bâtiment est neuf, c'est le luxe… et en plus, cerise sur le gâteau le lycée est mixte
!!! Non, c'est pas possible.
Maintenant, il faut aller au bureau pour votre inscription, suivez-moi.
“Ah ! PAHOUR… entre donc… Décidément on ne se quitte plus !”
Là, je dois rêver, je suis allongé, les yeux clos, une légère indigestion perturbe mon métabolisme, mais je vais aller mieux, il n'y a pas de raison… Non, je ne vais pas mieux, non je ne rêve pas, il est là, le même sourire en biais, prêt à m'agresser, c'est pas vrai… Guillemin ! Mais qu'est-ce qui fout là
? Je viens de reprendre perpette…
En vérité, non, il a vieilli un peu, l'environnement est très différent, la méthode militaire, c'est du passé.
Je m'y colle donc, cinq ans d'internat en plus.
Première année de BTS, nous sommes en 1965, la fin d'année est proche, je prends rendez-vous avec lui.
“Qu'est-ce que tu vas me demander ?”
En fait, je voudrais savoir si je peux être interne à la rentrée prochaine ?
Pourquoi cette question
? … je ne comprends pas tout.
Si, parce queeeeeeeee, voilà, en juillet prochain, là dans deux mois… je vais me marier
!
“(Silence)… Ah
! celle-là on ne me l'a pas encore faite… (Re-Silence)… Qu'est-ce que peut bien dire le règlement à ce sujet ? Je suis sûr que rien n'est prévu…”
“Ah ! c'est pas vrai… mais il faut, il faut
?”
Non ! mais je veux me marier.
“Alors on va dire que je n'en sais rien, tu te maries, tu ne m'as rien dit, mais je te préviens, ne viens pas me demander des autorisations de sorties tous les deux jours… Mais pourquoi veux-tu être interne
?”
Si je ne suis pas interne, ce ne sera même pas la peine que je me présente à l'examen…
“Aller, vas te marier et embrasse ta future pour moi
!”
L'année d'après, j'étais marié, j'étais interne, j'étais responsable de la section “ping-pong” ce qui fait que tous les jeudis je devais sortir dès 14 heures et rentrer sur les coups de 18 ou 19 heures… pour aller acheter des balles…
Hein
!… c'est pas beau comme stratagème, d'autant que régulièrement il me disait :
“Qu'est-ce que vous consommez comme balles
!”
Cette organisation nécessitait évidemment un moyen de locomotion… A savoir la Simca 5, dont certains se souviennent.
Oui, sans aucun doute, de très bons moments.

Et maintenant, je me repose… Imaginez, quatre petits enfants, trois garçons et une petite fille qui répond au doux prénom d'Eugénie… L'est pas belle la vie
!

Roger Camille Pahour.




Je me souviens de la belle aronde

Je me souviens quand j’étais interne au Lycée Technique de Corbeil, c’était dans les années 1962 à 1965. Je venais du Noooooooooooord et ne rentrais chez mes parents qu’à l’occasion des vacances.
Avec mon frère, interne comme moi, et nos copains “d’infortune”, Bébert de Vitré, Guillaume de Mazamet, et bien d’autres, le Foyer Social Educatif était notre fief. Nous participions aux différentes activités : ciné club, Feu Vert notre feuille de chou favorite, ping-pong, billard… Mais pour nos dimanches cela ne nous suffisait pas, alors nous avons décidé un jour d’acheter en commun une vieille Simca Aronde.
Ah la belle Aronde
 ! Nous en avons fait des sorties avec elle. Mais vu son grand âge (déjà à l’époque) elle nous en a donné du fil à retordre et nous n’avons pas tardé à connaître nos premières expériences en mécanique automobile. Crevaison lors d’une sortie et le cric qui n’en faisait qu’à sa tête en passant désespérément au travers du plancher déjà bien atteint par la rouille. Heureusement, l’équipe avait suffisamment de muscles pour tenir la voiture levée pendant qu’un privilégié (moi) effectuait le changement de roue.
Refaire l’embrayage était un classique, mais remplacer le pont arrière, qui nous avait lâché, par un autre trouvé à la casse était déjà moins commun. Et cela nous avait valu quelques remontrances le lundi matin, car, après avoir réalisé ces travaux un dimanche, sous l’auvent qui menait de l’internat à la loge du concierge, nous n’avions rien trouvé de mieux que de stocker l’ancien pont dans la descente du local du responsable de l’entretien. Evidemment, grâce à la pente, une flaque d’huile bien noire recouvrait le sol dès le lendemain matin.
Puis aux vacances nous retournions chez nos parents, souvent avec les copains et notre belle Aronde, pendant que d’autres œuvraient à Fontgillarde pour restaurer ce qui allait devenir une formidable maison de vacances.

Marc Dréville.




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